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Le Monde du Sud// Elsie news

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Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


Ebauche d'une radiographie de l'Etat haïtien et de la société - Par Johnny Estor

Publié par Johnny Estor sur 25 Octobre 2016, 23:05pm

Catégories : #AYITI ACTUALITES, #CULTURE, #REFLEXIONS perso

Ebauche d'une radiographie de l'Etat haïtien et de la société - Par Johnny Estor

 Une analyse  fort intéressante.

Un résumé du rapport entre l'Etat et la paysannerie issue de la fondation de la nation haïtienne.

Comme il s'agit d'un résumé, manquent certains points importants, tels que le rôle joué par le paiement de ce que Hollande a appelé "la rançon de l'indépendance".

Et qui dit rançon dit dépendance.

Et d'une manière générale, les interventions continues des anciennes puissances coloniales et de la CI dans les affaires intérieures du pays.

Toutes choses dont il ne faudrait pas négliger le poids, à la fois dans le fonctionnement des élites et dans celui de la paysannerie.

A part ça, des réflexions comme celle-ci ne peuvent être que profitables. On en a besoin.  On en redemande. Un peu d'air frais qui change du "kaka-bounda" ambiant.

J'aimerais bien que le sociologue qu'est M. Estor, puisse nous offrir son point de vue sur ce qui apparaît comme une obsession du bounda, des latrines, du kk,  des "grenn"d ans la société haïtienne.

Un truc dont  j'ai découvert la présence dans toutes les strates de la société- à partir de mon papier sur le "dîner  en blanc, dîner de cons " où les insultes les plus grossières faisaient usage d'arguments.

Pareil avec mon texte sur les médecins résidents, où l'un de ces médecins m'a conseillé de laver ma langue pour parler, après l'avoir utilisée pour essuyer mes fesses.

On a là un type qui a fait des études en médecine, ploge au stade anal, qui écrit de telles absurdités.

Imaginez une société dont les "lettrés" offrent un tel modéle !

Bon. Personnellement ça me choque parce que je ne pouvais même pas penser que  dans une société donnée puissent exister des "lettrés"  qui fassent dans les "grenn", le "bounda/kaka", les insultes ouvertement racistes. D'où mon appel à M. Estor pour qu'il m'éclaire en tant que sociologue - quoique il faudrait peut-être y adjoindre l'expertise d'un psychiatre.

 

          Mercredi 19 octobre dernier, lors d’une conférence sur la problématique de l’alimentation en Haïti organisée à Saint-Raphaël a l’occasion de la journée mondiale de l’alimentation (16 octobre) pour des irrigants, autorités locales et notables de Savanette, Buenabite, Merlène et Saint-Raphaël. Après l’exposé des intervenants, dont je me garde de citer leurs noms, autour du terme : ‘l’insuffisance de la production agricole nationale par rapport au besoin alimentaire de la population haïtienne, conséquences et perspectives.

.’Devant la présentation de la gravité de la situation de l’augmentation des besoins en alimentation du pays par rapport à ce que nous arrivons à produire au niveau agricole qui se réduit avec le temps, en réactions, les participants n’ont pas cessé de pointer du droit l’Etat haïtien comme principale responsable de cela. Face à leur insistance, j’ai dû en tant que responsable de l’activité et le seul sociologue sur place, leur faire un peu ‘une Radiographie de l’Etat haïtien’, que je me fais le plaisir de partager avec vous chers(es) internautes.l’insuffisance de la production agricole nationale par rapport au besoin alimentaire de la population haïtienne, conséquences et perspectivesMercredi 19 octobre dernier, lors d’une conférence sur la problématique de l’alimentation en Haïti organisée à Saint-Raphaël a l’occasion de la journée mondiale de l’alimentation (16 octobre) pour des irrigants, autorités locales et notables de Savanette, Buenabite, Merlène et Saint-Raphaël. Après l’exposé des intervenants, dont je me garde de citer leurs noms, autour du terme : ‘

Alors voici en résumé l’explication que j’ai proposée aux participants sur le constat de l’absence de supports et d’accompagnement significatifs de l’Etat dans l’agriculture et dans le milieu rural en particulier.

L’Etat haïtien est engendré d’une contradiction originelle découlant des deux catégories qui constituaient la société haïtienne avec leurs deux différents projets économiques dès la proclamation de la liberté générale, depuis sous le règne de Toussaint Louverture. Comme vous devez le savoir, les anciens libres (Noirs et Mulâtres) voulaient garder la grande plantation et remplacer ainsi les Blancs qui ont été chassés. Et les nouveaux libres ne se voyaient plus continuer à travailler sur ces champs (séquelles de l’esclavage) et fuyaient vers les montagnes (les mornes) et ont développé une agriculture d’autosuffisance, la liberté signifiait pour eux travailler librement à leur propre compte.  

Étant donné, qu’à part Dessalines, tous les premiers dirigeants du nouvel Etat ressortaient de la catégorie des anciens libres, on verra qu’au niveau économique tout l’effort des premiers chefs d’Etat du pays va être la tentative d’imposer leur projet économique au reste du pays, de forcer les masses à travailler sur les grandes plantations. Ils viendront avec des codes ruraux de plus en plus sévères, avec une police rurale ayant les pouvoirs de vie ou de mort sur les paysans, etc. Donc, l’Etat sera en face et contre les masses paysannes dès le départ. Ces dernières développeront une panoplie de stratégies de résistance (sorcellerie, empoisonnement et révoltes Goman, Acaau, etc.), de contournement (la gentillesse et la sympathie exagérée dans certaines communautés paysannes, tromperie), d’évitement (marronnage), etc. L’effet de cette résistance portera les anciens libres, devenus les nouvelles élites socio-économiques et politiques du pays, par dépit, à résider globalement dans les villes et sous forme de contrat de deux moitiés avec certains paysans à vivre de la rente, du commerce (importation et exportation) et de la politique.

Cette résistance va également, avec le temps, affaiblir continuellement l’Etat haïtien qui aura de plus en plus de difficultés à faire respecter les codes ruraux et c’est peut-être là aussi l’origine du non-respect des lois de manière générale dans le pays et du caractère injuste si profond qui caractérise les lois haïtiennes et l’exercice de la justice par les hommes de lois en Haïti. Devant son incapacité, voir l’échec de l’état haïtien à imposer par la force le projet de cette élite,  Il va tout simplement abandonner et délaisser ces masses à se débrouiller elles-mêmes. Il ne va pas chercher à se renforcer pour apporter une aide significative accompagner et supporter la production des masses paysannes. A part quelques réaménagements de certaines structures d’irrigation dans les plaines, du fait qu’elles appartiennent à cette élite absentéiste, les supports technique et financier sont quasiment inexistants.

Il faut dire également que la présence des denrées agricoles (café, coton, cacao, pitre, etc.) dans la production paysanne (morne et plaine comprises) restait à travers le temps le seul point d’intérêt de l’état et de cette élite. Et qui pouvait expliquer un minimum de présence de ces derniers dans la paysannerie.  Cependant, les crises des années 1980 vont causer le quasi élimination des denrées dans la production agricole du pays et provoquera l’abandon total de l’Etat dans la paysannerie. Ceci marquera également la fin et l’effondrement total du projet des anciens libres, donc des élites et de ses instruments de coercition les codes ruraux (les lois en générales), les choukèt la rouze, la barrière des villes (lieux de refuge de l’élite), son instrument de coercition l’armée et en dernier lieux l’Etat Haïtien.  

Maintenant, dans les contextes particuliers d’après janvier 2010 et Matthew de 2016, devant la mise à nue de nos vulnérabilités, plusieurs voix se sont élevées sur la nécessité d’une refondation de l’Etat dans un premier temps et actuellement de changer l’Etat. Cependant, les intervenants (professeurs d’université, intellectuels de tout bord droite/gauche, politiciens, directeurs d’opinion) n’ont jamais pu mettre du contenu, d’âme, d’essence (nannan) dans leur dire, d’où ce qui s’apparente à un simple slogan, un de plus. Alors ce qu’il s’agit de la nécessité du moment, et ce depuis quelques temps déjà.

Si le projet des élites originelles a échoué, il faut reconnaitre aussi que celui des masses n’a pas plus réussi que cela. Car il est accompagné de pas mal d’effets néfastes, dont : l’émiettement des terres, l’érosion dans les mornes qui a eu beaucoup d’effets néfastes sur l’environnement en général et face à leurs difficultés la migration et l’exode rural. D’où parler de refondation de l’Etat ne signifie pas l’adoption automatique du projet des masses des nouveaux libres, c’est ce qui constitue selon moi l’erreur de la gauche haïtienne. Cela impliquerait de préférence, l’élaboration d’un troisième projet, un nouveau projet de société, cette fois-ci plus intégrateur. Cependant, la question à se poser maintenant, est celle-ci, quelle sera la catégorie sociale porteuse de ce nouveau projet ? Serait-ce les migrés des villes, la diaspora, une reconversion des élites traditionnelles ? Qui sait ? L’avenir le dira.

 

 

 

 

Johnny Estor, Sociologue

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